samedi 25 juillet 2020

Champions!

Comme je vous l'avais dit il y a quelques jours, les Jeux Australiques se sont déroulés le week-end dernier. C'était la quatrième édition de cette compétition sportive entre les bases antarctiques et subantarctiques françaises.

Lever de soleil ce matin

Samedi, pendant que l'on commençait les épreuves, "ma tempête" soufflait rageusement. Elle n'était pas très puissante mais a bien réduit la visibilité avec la neige poudreuse soufflée. Juste ce qu'il faut pour s'égarer entre la salle de sport et le Séjour. Avec 99 km/h de moyenne sur dix minutes et une rafale maximum à 149km/h, je me classe tout juste neuvième sur les onze tempêtes que nous avons connu jusqu'ici. La journée a tout de même été animée.

Toutes les épreuves sportives étaient en relais, ce qui a contribué à la réussite et à la bonne humeur de tout le monde sur le week-end. 
Au programme du samedi matin: 80 km de vélo d'appartement en un minimum de temps. Étant adepte de vélo, je me suis improvisé capitaine sur cette épreuve, et avec Julien, Cédric, Alain, Pascal, Malik et Michel, nous avons réussi l'exploit de parcourir la distance en 1h21, presque 60km/h de moyenne! Pour cela il fallait tenir une cadence de pédalage de 160 tours/minutes, deux fois plus vite qu'une balade à vélo classique et de changer régulièrement d'athlète, entre cinq et dix minutes par relais, suivant les capacités de chacun. J'ai "roulé" 21 minutes, musique à fond, motivé comme jamais. Notre équipe était tellement déchaînée qu'une pédale a fini par se démonter à la fin de l'épreuve.


Les cyclistes
L'après-midi, je suis allé encourager et chronométrer les "cross-fitteurs". Ils devaient enchaîner en équipe 250 sauts, 250 pompes, 250 abdos et 250 pompes combinées à un saut (burpees) le plus rapidement possible. N'étant pas du tout spécialiste là dedans, je pensais qu'il faudrait au moins une heure pour effectuer tous les mouvements, mais à mon grand étonnement, il a fallu moins de 28 minutes aux huit sportifs.

La soirée a été consacré à l'anniversaire de Cédric notre électricien, avec une raclette généreuse et un bon gâteau, parfait pour la récupération. J'ai également participé à l'épreuve de billard (rentrer toutes les boules en un minimum de coup) et de fléchettes (le maximum de points en 15 flèches). Tout le monde pouvait participer, les trois meilleurs résultats individuels étaient additionnés. Je me suis bien débrouillé aux fléchettes avec le troisième meilleur total, 343 points.

Le dimanche matin, nous nous sommes concentré sur le rameur. Avec Michel, Valentin et Cédric, nous devions parcourir 20 kilomètres en un minimum de temps. Nous changions toutes les cinq minutes, le temps idéal pour se donner à fond sans se cramer. En moins de 1H19, nous avions fini l'épreuve, tout à fait dans nos espérances et nos capacités.
Juste après, l'épreuve de gainage a mobilisé du monde mais j'ai passé mon tour. Comme pour les autres épreuves individuelles, les trois meilleurs temps étaient additionnés. Bravo au bâtiment Géophy "(*private joke pour eux* C'est quoi ce m*rdier, vous n'avez que ça à br*nler ici?)" pour leur deux premières places, mais qui ne font pas le poids face aux autres bases qui nous écrasent largement sur cette épreuve.

Les rameurs
Après un repos bien mérité, il nous restait les vingt kilomètres de course à pied sur une pente à 2%, sur tapis. Je me suis aligné sur la course avec Alexis, Régis, Alain et Antoine. Nous changions de relayeur tous les kilomètres, en réglant le tapis entre 16 et 17 km/h, au maximum de nos capacités après deux jours d'effort. N'aimant pas vraiment courir, les quatre minutes de relais étaient bien longues, la récupération difficile et les encouragements du public présent m'ont porté dans les derniers mètres. Résultat 1H13 pour 20 km.



Relais

Les coureurs
Et le clip de danse était fini depuis quelques jours, avec une participation de 23 personnes sur les chorégraphies, avec entre autres: un porté sur "Time of my Life", Will Smith par -20°c, Thriller dans la neige,  "la Carioca" encore mieux qu'en vrai, Beyonce en perruque, "Call on me" en slip... Tout cela sous la direction de Charlène qui n'a pas compté son temps sur un mois. Le résultat est incroyable et a fait l'unanimité chez nos adversaires.

Comme j'avais passé un bon week-end et que de plus ma tempête était enfin passée, mardi midi, j'ai sorti deux de mes bouteilles de champagne et deux pots de pâté maison. Nous en avons profité pour visionner les vidéos de danse de nos concurrents et pour choisir nos préférés. Les résultats ont été annoncés mardi soir par Régis au Séjour, juste après le repas. Et avec cinq victoires (vélo, course, billard, fléchettes et danse) sur les huit épreuves, c'est la première fois que le district de Dumont d'Urville triomphe. Des scènes de liesse ont été observées partout en Terre Adélie!!! Même L’Equipe en a fait sa une. La TA71 aura donc la lourde tâche d'organiser la prochaine édition.

Tout donné!

Et lundi je suis allé avec Susie et François voir les manchots. Comme Susie est ornithologues, nous avions l'autorisation d'approcher d'un peu plus près qu'à l'accoutumée la colonie. J'ai ainsi pu voir pour la première fois les pious-pious, surnom que l'on donne ici aux petits manchots empereurs. Ils sont nés il y a une semaine environ. C'était un très beau spectacle et je vous partage quelques photos que j'ai prise à ce moment.











jeudi 16 juillet 2020

En attendant "ma" tempête

La tempête Bastien a encore fait faux-bond la semaine dernière mais devrait enfin arriver cette fin de semaine. Il a pourtant soufflé fort, plus de 150km/h en rafales, mais ici nous définissons les tempêtes avec une moyenne de vent supérieure à 50 nœuds (93km/h) sur 10 minutes. Et à cause de conditions météo peu communes (une couche de vent fort plus épaisse que d'habitude), les rafales étaient fortes mais le vent moyen assez faible. Le sacro-saint modèle météorologique était faux. François m'avait prédit peut être l'une des tempêtes les plus puissantes de l'année et ce fut un pétard mouillé. Vous pouvez consulter le blog de François Gourand qui a publié une bonne explication du phénomène.
J'ai bien fait de ne pas annoncer trop tôt que je payais l'apéro pour fêter la tempête en mon honneur.
Pour vendredi et samedi, il est annoncé entre 90 et 110km/h de vent moyen et jusqu'à 170km/h en rafales. Ce devrait être suffisant pour embêter tout le monde.


Après toute cette neige tombée, le vent et les fortes marées  nous avons enfin eu un jour de presque répit (hier) avec du soleil (enfin!!!) pour remonter les matériaux stockés sur la piste du Lion dans le but de continuer les travaux du BT. Je dis presque répit puisque la matinée était sans vent puis le "mur de neige" (neige soufflée par le vent catabatique, venant du continent) nous a recouvert, réduisant la visibilité et rendant moins agréable mais plus spectaculaire le travail extérieur (50km/h de vent et -15°c).
Le mur de neige qui nous recouvre
 J'ai pu attaquer la troisième partie des travaux, c'est à dire la fin de la pose du sol et des cloisons dans les bureaux de Météo France. Il ne faut pas traîner car les travaux doivent être finis dans l'idéal dans le mois de septembre avant les transferts de fioul, de la piste du Lion à la base Prud'homme.

Le mois de juillet, peu propice aux balades extérieures (qui me manquent forcément), est par contre animé par diverses animations inter-bases.
Nous participerons ce week-end aux "jeux australiques", compétitions sportive entre les bases françaises de l'antarctique (nous) et des îles sub-antarctiques (Kerguelen, Crozet, Amsterdam). Au programme: salle de sport avec des relais de rameur, de vélo, de tapis de course, de cross-fit; de l'adresse avec du billard et des fléchettes et une vidéo de danse à présenter. Je vais tout donner pour les sports d'endurance (mon point fort) et tenter ma chance aux fléchettes.
Pour la danse, Charlène nous a concocté un spectacle assez rigolo, qui a mobilisé presque tout le monde depuis un mois. A force de répétitions, nous avons un résultat remarquable: un mélange de Dirty Dancing, Thriller ou encore Men In Black.
Même si nous finissons dernier de ce tournoi, cela nous aura permis de rigoler et de s'entretenir physiquement avec un objectif sportif. C'est la véritable et seule récompense!

Je crois que Concordia ne participera pas à la compétition, puisqu'ils organisent cette année le Festival du Film Antarctique, compétition internationale entre toutes les bases du continent et des îles subantarctiques.
Je passe mon tour pour cette compétition, étant novice en réalisation de films. Mais certains de mes camarades hivernants sont déjà sur le coup. Résultat dans moins de trois semaines.
Je me suis plutôt impliqué ces derniers temps dans la création du logo de notre mission, dans le but de l'intégrer dans nos vêtements de mission, une tradition ici. J'espère pouvoir vous le présenter dans quelques jours, pas simple de trouver une idée commune à 24 personnes et de la mettre joliment en forme.


mardi 7 juillet 2020

De la neige, du vent, de la neige et de la chaleur

Le début de l'hiver était, je trouve, assez pauvre en neige. En une semaine, il est tombé plusieurs dizaines de centimètres et l'environnement sur la base a bien changé. Il faut maintenant descendre les véhicules dans le garage au lieu de les faire grimper par la rampe abrupte, les passerelles à la sortie du dortoir ont disparu. Les congères sont vraiment passées à un autre niveau et il est devenu vain de vouloir déneiger certaines passerelles ou accès. On choisit plutôt l'option "on va marcher dessus au lieu de déneiger". Même si c'est assez pénible de marcher, parfois la neige tassée me porte et parfois je me retrouve d'un coup enfoncé jusqu'aux genoux. De plus, le manque de soleil produit un effet "jour blanc", on ne voit pas les reliefs et il m'arrive de mettre la frontale en plein jour pour distinguer les creux et les bosses.
Le moindre relief créé une congère en peu de temps et tous les trous sont vite bouchés donc inutile de se casser le dos à creuser des tranchées. On privilégie l’aplanissement de la neige. C'est pour cela que samedi matin 8 heures, nous avons pris les pelles pour disperser la neige à côté de l'entrée principale du séjour et limiter l'enneigement devant la porte. Pendant plus d'une heure et demi, on a étalé plusieurs mètres cube de neige. On n'a pas eu froid!

Les températures sont bien remontées ces derniers jours -4°c, contrastant nettement avec la mi-juin et les -25°c... On pourrait penser que la vie est plus simple avec des températures plus douces mais je trouve que cela nous cause plus de problèmes. Une sorte de neige/pluie verglaçante est tombée, englaçant entre autres les passerelles entre les bâtiments et les transformant en patinoires et déposant une croûte de glace sur la neige fraîche, juste ce qu'il faut pour m’embêter pour skier. J'en ai quand même profité pour aller voir les manchots et profiter du lever de soleil avec une colonne lumineuse (Wikipédia vous expliquera ce que c'est).


L'approvisionnement du chantier du BT/Météo est également dépendant de la météo. Je dois aller chercher des matériaux pour finir le sol et les cloisons et transporter des déchets mais tout est stocké sur la piste du Lion dans des conteneurs. Il faut donc trouver le bon créneau pour traverser la banquise avec les véhicules, sans trop de neige ni trop de vent. La dernière fois, des panneaux de bois se sont envolés de la benne du Morooka suite à des rafales de vent catabatique... Je voulais y aller lundi mais le bulletin météo annonçait du vent à 70km/h. J'ai donc tenté dimanche après-midi, pour ne pas me retrouver à l’arrêt.

J'ai demandé à Loïc de venir m'aider. La première difficulté était déjà de rejoindre la route, le Morooka pataugeait dans la poudreuse fraîche. Une fois sur la banquise, nous devions longer l'île des Pétrels, pour se tenir le plus loin possible de la colonie de manchots et traverser le chenal du Lion, pour monter sur le quai où l'Astrolabe s'amarre et monter sur la piste du Lion. Tout s'est bien passé jusqu'à ce que j'essaie d'accéder au quai. Avec la pleine lune et les grosses marées, de l'eau de mer est remontée au dessus de la banquise par les fissures le long des îles. La neige a été imbibée d'eau et je me suis planté dedans et l'avant du véhicule s'est enfoncé de trente centimètres... J'ai tenté la marche arrière, sans succès, les chenilles ne faisaient que creuser. Heureusement, l'arrière était toujours sur la glace dure. Il y avait peu de chance que l'on finisse à l'eau puisqu'il y avait sûrement encore un mètre de glace sous les chenilles mais je dois avouer que je me suis bien fait peur. On a été obligé d'appeler de l'aide à la radio, pour que Corentin, Alain et Régis viennent avec des pelles. Nous avons creusé sous les chenilles pour remettre tout à plat et nous sommes montés dans la benne pour ajouter du poids sur l'arrière, retrouver de l'adhérence et sortir du bourbier. J'ai laissé Corentin rentrer le Morooka, sans mes matériaux tandis que je remontais à pied sur la base pour me remettre des émotions.

Corentin pas content (juste pour la pĥoto!)
Moralité: ne pas travailler le dimanche... Mais c'est surtout le combo redoux/neige/grandes marées qui m'a piégé.

Le chantier attendra encore quelques jours puisque la tempête Bastien risque d'arriver les prochains jours. En attendant, je m'occupe avec diverses réparations et petites commandes qui traînaient un peu.


Les manchots couvent et les premières éclosions ont eu lieu mais les petits se cachent.